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Lugrin Angela
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« Le mot "infractus", ce mot des pauvres, des illettrés, des apeurés, je veux qu'il soit un mot puissant et vigoureux comme un chevalier, désignant le sentiment d'être brisé du dedans, d'être vaporeux et en lambeaux, sans base distincte. » Ce mot qui surgit à l'annonce de l'infarctus de son frère, Angela Lugrin s'en empare comme d'un « lieu-caverne » sur les parois duquel se profile l'ombre de leur lien de frère et soeur.
Si son frère se méfie des mots, Angela Lugrin sent au contraire qu'en ce moment de fracas elle doit de toute urgence écrire, faire battre le coeur de leur « amour indéfectible », pulser leur « langue commune » et réanimer... les vacances, les voyages, les fous rires, les parents, leur groupe punk, leur tendresse pour les bas-côtés et ceux qui y trouvent refuge. Ce recours à l'écriture est bercé par les livres témoins, par les mots de Racine, Duras, Quignard, Rousseau ou Bonnefoy qui, l'auteure le sait, portent et tiennent debout celui qui chancelle.
Angela Lugrin nous fait entendre ici une nouvelle fois la puissance de l'écriture et de la littérature qui savent, parfois, border l'innommable quand il fait effraction dans notre réalité quotidienne. -
Alors qu'elle est exposée à une « panne d'écrire », un rêve s'impose à l'autrice, dans lequel quelque chose s'énonce sans se dire. Elle se laisse entraîner par les images oniriques gravitant autour de Marie Depussé, son amie disparue, et les déplie au fil du livre : le silence, la solitude, le soleil, le rouge à lèvres, une voiture blanche...
Angela Lugrin vagabonde dans cette arborescence d'images et y découvre peu à peu les linéaments de son désir d'écrire. À la confluence des « chemins d'errance » que le rêve autorise, se dessine progressivement un lieu depuis lequel écrire est possible. Dans ce lieu, la réalité tremble, les équilibres sont fragiles et les murs sans cesse à repousser pour maintenir le vivant dans l'air vigoureux du dehors, dans un « état de veille et d'éveil », une conscience aiguë.
Le silence qui a précédé ce livre n'avait rien d'inquiétant, il ouvrait la voie à l'acceptation d'un « je » fragmenté à la manière des visions magiques et sans cesse renouvelées des kaléidoscopes, un « je » énigmatique, pétri de tout ce qui l'entoure, depuis la moindre des choses jusqu'au soleil lui-même, ouvert à l'incandescence de toute vie. Un « je » qui n'a plus peur, enfin, de rester là. -